Ce n’est jamais bon le moment. Il ne faut pas se leurrer, le bon moment ne se révèle jamais au grand jour. Il y a le moment, présent. Et sur le moment, on se sent bien, moyennement bien ou pas bien. Et voilà où se trouve le fameux bon moment. Les frontières sont ténues. Si l’esprit ne passait son temps à nous jouer des tours on pourrait peut-être s’attarder un petit peu sur le moment vécu. Le seul qui existe, le moment présent, pas le rêvé, l’imaginé. Il suffirait d’observer et de sentir, et pourquoi pas d’écouter. Le moment c’est ça, voir sentir écouter. Toucher relève presque du miracle, de l’au delà. Prendre des forces pour être là, ne se résume pas à un rêve éloigné. Nous sommes impatients, inquiets, agités. Nous nous fâchons, nos mots se tendent sans réfléchir. Les agressions se répètent, de toutes sortes. Elles s’accumulent, vont et viennent, s’enfoncent au plus profond de l’âme. L’esprit attaque sa proie. Il se régale de nous voir douter et de perdre pied. C’est toujours le bon pour lui d’attaquer, de revenir à la charge avec ses idées virtuelles qui n’existent pas mais qui entrent en toi. L’esprit ravage tout sur son passage. L’espoir de croire, l’espoir de se savoir plus fort. Plus fort que quoi? Plus fort que qui ? Il n’y a que toi et moi et tu ne sais pas qui je suis puisque tu n’existes pas. Se battre est une issue. Mais en est-on si sûr? Ne pas rester sans rien dire, ne pas se sentir humilié, ne pas réagir. Laisser passer, flâner puis essayer de retirer le poids de ces pensées qui pèsent si lourd. Que rien ne vous empêche de dormir, cela n’en vaut pas la peine. Ne vous fatiguez pas, laissez-vous aller, vous n’avez pas la solution, elle n’existe pas. Elle s’imposera d’elle-même, ou pas d’ailleurs. Mais ce sera la conclusion, la solution. Il se passera quelque chose qui fera que ce sera terminé, que l’on n’en parlera plus, que l’on n’y pensera plus. Car, c’est ça qu’il se passe. Oui, c’est cela. Quoi qu’il se passe, cela finit toujours par se terminer, par s’oublier, par disparaître. Ça apparaît puis ça disparaît. Sans fin. Ne pas souffrir de ce que l’on ne contrôle pas. Ne pas croire, un seul instant, que l’on peut changer quelque chose. On ne changera rien à ce que l’esprit aura décidé d’exposer. Il agit seul, sans contrôle. Il se faufile, sournoisement. C’est sans doute pour cela qu’on l’appelle encore parfois le mauvais esprit. Il n’est pas mauvais, il n’est simplement pas bon. Être libre, être là. Écrire est physique, penser est une folie incontrôlable. Anticiper une absurdité. Croire un soulagement, une illusion donc. Ne pas se laisser malmener par l’esprit. Avoir la volonté de lutter contre ses pensées. Avoir la volonté d’être, pleinement, là. Sans jamais oublier de se rappeler que c’est ici et maintenant, et non ailleurs et plus tard. Ailleurs et plus tard n’existent pas. Ils ont disparu au moment où ils sont apparus. Ailleurs et plus tard n’existeront jamais, il y aura toujours un ici et maintenant.
Être conscient de cela, c’est une première étape, essentielle. Vitale.