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Bar-ce-lo-na (fenêtre de) | Anne Savelli | #vasescommunicants

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Une semaine à peine durant laquelle, dès la descente d’avion puis le premier trajet en métro, se faire tout voler sauf les clefs de l’appartement.

Une semaine à vivre dans une rue étroite, d’où aller, venir, au deuxième étage s’allonger, manger et regarder en face par la fenêtre ouverte. Les pièces sont étroites, elles aussi, on croirait vivre dans un couloir : remonter le store, se pencher, du trottoir au ciel chaque fois c’est un appel d’air.

Un espace vital réduit, comme on dit. Figures de sages, damier noir et blanc de la salle d’eau, quelques touches orange : l’appartement se veut harmonieux, pourtant. Conçu pour calmer, apaiser le touriste il oppresse parfois, tant on devine ses intentions. Décoration de magazine où tout doit être fonctionnel et livrer son supplément d’âme ; déplacement réfléchi d’un meuble à l’autre pour ne pas se cogner aux angles, aux valises, aux humains qui les portent.

Se sentir comme une poupée dans sa maison de.
Ne rien déranger signifie : s’asseoir, se lever, prendre son sac, partir ?
Sac vide. Comment digérer ce vol ?

La fenêtre donne sur une façade à briques rouges (c’est Londres !)
(Barcelone, on te dit).
Aux fenêtres d’en face pendent par séries des jeans et tee-shirts (Gênes !)
(Bar-ce-lo-na).
On y voit aussi ce qui s’apparente à une boîte aux lettres, accrochée dans le vide au troisième étage. Enigme du matin, du soir : elle devient poubelle ou compteur de gaz. Utile, inutile ? Un détail jaune vif.

Le soleil en haut n’éclaire qu’un pan de mur, le même à toute heure. La ligne d’horizon, cette crête d’immeubles, dessine une portée, des cordes de guitare. Y cada noche, me pierdo en la ciudad, cada cada noche, Bar-ce-lo-na scande la chanson restée en tête depuis Paris. Elle raconte, croit-on, la vie qu’on n’a pas, joies, dangers mêlés.

Tête baissée, se rappeler qu’en bifurquant
une, deux, trois rues : la mer.
Des bancs, des palmiers, de l’architecture.

La façade de briques, c’est la ville ouverte, aussi. Nous révèle l’histoire d’un quartier en évolution, resté populaire – pour combien de temps, éternelle question. En bas, au carrefour, une boulangerie où prendre le café, où tenter de comprendre ce que se racontent les femmes qui ne vont pas au bar devient point d’ancrage.

Se pencher, se pencher encore. Autre chose à voir ?

Circuits, circonvolutions, les mains dans les poches, d’une rue à l’autre, toute la journée, dans la ville entière : s’en souvenir le soir en fermant la fenêtre.
Dans ce quadrillage reviennent les ramblas. Mais tout ce qu’on saisit ce sont les hommes qui volent, trois corps ajustés et cent doigts habiles.

Ramblas : durant des années, avant de s’y rendre, Barcelone ne fut que ce nom, caché par un titre, donné par un homme. Ramblas, Journal du voleur, Jean Genet. La vie est un livre. Faut-il s’en débarrasser ?

Je remercie Anne Savelli (fenêtres open space) pour ce vase communicant. Les Autres Vases Communicants du mois de novembre.